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Du plagiat au génie
Et si… on découvrait comment naissait une idée vraiment «originale» ? Toutes les innovations ne sont-elles pas le fruit de multiples interactions, d’emprunts, de traces, d’imitations qui, au final, créent un produit ou un service « nouveau » ?
Chronique publiée en exclusivité pour
Le chemin tordu des idées originales
Les pieds dans le plat de la bienséance, David Kord Murray a écrit ce que personne d’autre n’a osé imprimer : « Nous sommes tous des imitateurs perspicaces, ingénieux et persistants». Autrement dit, arrêtons de mettre sur des piédestaux les Bill Gates et tant d’autres… Bien sûr, loin de nous l’idée de « copier » sur son voisin. Mais une fois sa copie rendue, pourquoi ne pas aller jeter un œil sur sa solution ? C’est justement ce processus, la plupart du temps subconscient, qui se met en branle lors du processus de l’accouchement de nos idées géniales.
Si vous copiez, c’est du vol, si vous vous inspirez, vous êtes un chercheur
Bill Gates n’a rien inventé, à proprement parler. Il est devenu l’homme le plus riche du monde en achetant (et « hackant » à distance) des solutions logicielles disponibles à proximité puis en les assemblant intelligemment. D’où son surnom dans la Silicon Valley : « le Pirate ».
A l’inverse, Charles Darwin a parcouru le monde entier, apprenant la climatologie, la géologie, la navigation par les étoiles, l’économie malthusienne, jusqu’aux îles Galapagos, là où la biologie des laboratoires ne veut plus rien dire, pour finaliser sa théorie de l’évolution.
Personne ne le surnomme le « pirate des Galapogos ». Le tout est de sortir de son industrie. Frontière fragile entre le plagiat et le génie. Si vous copiez un auteur, c’est du vol, si vous vous inspirez de dizaines d’auteurs multiples, vous êtes un chercheur.
Pas d’opération du Saint Esprit
Métaphore du cuistot. Que ferait-il sans les fruits et ses légumes qu’il aurait lui-même sélectionné, où irait-il se les procurer, par quel moyen les cuire, comment faire la différence avec les restaurants voisins ?
Einstein lui-même faisait état de cette interconnexion infinie : « le secret de la créativité est de savoir comme vous cachez vos sources ». Mais avant de les cacher, encore faut-il les déterminer et se les procurer ? Chacun de nous emprunte des idées, les combine avec d’autres pour construire sa propre originalité. Ceci est le résultat d’une combinaison, pas une opération du Saint Esprit.
Les six étapes de la création d’une idée :
- Définir le problème à résoudre
- Emprunter des idées à ceux qui partagent le même problème, où que ce soit
- Combiner toutes ces sources
- Incuber une première solution
- Juger les forces et les faiblesses de votre solution
- Eliminer les points faibles, renforcer les points forts
C’est la diversité des lieux où se trouvent les sources auxquelles vous vous désaltérez qui comptera. Plus loin vous irez les trouver, plus féconde sera votre idée. Le biologiste ira les chercher dans l’astronomie. L’astronome dans la macro économie. L’économiste dans sa dernière partie de poker. « Les poètes immatures imitent ; les poètes matures empruntent » (T.S.Eliot). La majorité des scénarios mises en scène au cinéma ne sont-ils pas « calqués » sur des faits réels ?
Tester et observer
Sortir de son domaine de prédilection devient la clef, et l’assurance de la découverte.
L’idée reste avant tout synonyme d’expérience et d’observation.
Pied de nez de l’animal à l’être humain « domestiqué » : c’est en décryptant attentivement la manière dont les meutes de loups rabattaient leurs proies que les premiers hommes apprirent à chasser.
NR
Conseil de lecture
Borrowing Brilliance
The six steps to business innovation by building on the ideas of others
By David Kord Murray
Gotham Books,
New York, 2009
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