Séries

Décoder l’entreprise (5) : Sens, Présence, Existence

Posted: 26 juin 2016 à 3:45   /   by   /   comments (0)

Et si… dans les gisements secrets des organisations se dissimulaient nombre filons de vérité à extraire. suite et fin de notre rie de réflexions sur le décodage des signes visibles et invisibles produits par l’entreprise.

Prendre conscience des codes

Creuser, creuser toujours… espérer, s’interroger sans cesse, renouveler l’effort du décodage comme on le ferait d’une utopie collective, à la poursuite d’un diamant vert de la performance, clef magique, trésor espéré, recette miracle, passe droit… Outillage irremplaçable de tous les Sisyphe de la spéculation occidentale : la pioche, la pelle et le tamis pour comprendre et ne point s’en tenir au mensonge des apparences.

Plus l’être humain comprend la réalité, plus il est libre et riche.  Mais comment s’y retrouver dans ce chemin de la compréhension, parfois si long, si abrupt ?

En empruntant trois séquences successives, chacune remplissant une fonction bien précise :

  • Tout d’abord, saisir soi-même les manifestations du réel, hors de l’abstraction ; c’est la borne du sens.
  • Ensuite, faire de cette réalité sa propre vérité ; c’est la borne de la présence.
  • Enfin, dialoguer avec les autres autour de cette vérité là. Pas de vérité qui dure sans émerger de la conversation, de la communication interpersonnelle ; c’est la borne de l’existence.

 

Un dialogue plus fructueux, plus constructif, plus ambitieux

Sens, présence, existence ? Etre sur le terrain, s’imprégner, aller à la rencontre de l’autre… On rajoutera à cette discipline, une quatrième étape, préalable à toute les autres.

Dans ses ouvrages de philosophie comparative entre la Grèce antique et la Chine confucéenne François Jullien, ancien président du Collège international de philosophie, suggére les clefs d’une prise de conscience encore plus fructueuse, constructive, ambitieuse. Prise de conscience qui passe par un chemin critique, ardu, délicat : la connaissance de soi, étape préalable à celles du triptyque ci-dessus.

Nos ancêtres grecs avaient, les premiers, distingué le bien du mal afin de sortir enfin de l’ambiguïté et cesser de subir la loi capricieuse des Dieux. Cette vérité de la pensée, que Nietzsche trouvait si curieuse, a guidé depuis lors tous nos élans, toutes nos révolutions, toutes nos inventions,.

La table du dialogue entre l’Occident et l’ Orient (d’après François Jullien) :

Clefs de la compréhension

Occident Orient
Moteur de recherche Révélation Régulation
Point de convergence de la pensée Besoin de Vérité Besoin de Voie
Etat rêvé Le stable Le possible
Expression Dire (le vrai), discourir Se taire (rien à dire), remarquer
Référence La raison L’indication
Mode de tri, de sélection Exclusion Complémentarité
Pédagogie On démontre On montre du doigt
Etat Etre Devenir
Personnage supérieur Le philosophe Le sage
Rapport à l’environnement Face à face L’allusion (oblique)
Action sur les éléments Le jeu La manipulation
But du rapport aux autres Assentiment de l’autre Autoréférentiel
Mode parlé Dialogue (débat) Soliloque
Vision Partisan + Généralité Angle + Global
Positionnement La partialité Le milieu variable
Effet La crainte des autres La congruence (ce qui convient à la situation donnée)
Logique Du sens De l’évidence
Energie Liberté Spontanéité
Expertise Expliquer Savourer
Motivation Progresser S’adapter
Objectif ultime Vers l’aboutissement (délivrance) Vers la viabilité (par un passage)
Ite missa est… Ainsi soit-il ! Ainsi est-il !

 

Pourquoi ne pas apprendre à être, à la fois, philosophe (celui qui recherche la vérité) et sage (celui qui a dépassé les contradictions, qui n’exclut plus) ? Sans tomber dans un juste milieu inaccessible, mais en trouvant un équilibre, instable, salutaire, qui réconcilierait, dans une pensée « ouverte », la parole et le silence… pour ne laisser libre cours qu’à l’évidence.

Au penseur chinois du III° siècle avant J.-C., Mencius, (« De façon générale, le malheur des hommes tient à ce qu’ils ont l’esprit aveuglé par un aspect particulier et laissent dans l’ombre la logique d’ensemble »), Ludwig Wittgenstein répliquait en 1937 : « La solution du problème que tu vois dans la vie, c’est une manière de vivre qui fasse disparaître le problème ».

Les grilles de décodage de demain seront celles qui, au-delà des constats apparents, frontaux, parfois sous jacents, souvent violents, sauront dépasser les schémas préétablis. On ne décryptera pas les autres si l’on ne sait pas se décrypter soi-même.

Nicolas Rousseaux

 

FIN de la série

Rappel des épisodes précédents :

  • Introduction – Le test de l’ascenseur
  • Episode n°1 – Architectures apparentes
  • Episode n°2 – Mystères des rituels
  • Episode n°3 – Ressorts cachés
  • Episode n°4 – Analyse des écosystèmes
  • Episode n°5 – Sens, Présence, Existence

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