Chroniques
Cette sensation d’épuisement total
Et si… la conjonction de l’arrivée massive des robots, la fin du pétrole, l’exacerbation de la compétitivité et l’hyper communication débouchaient sur une forme contemporaine d’overdose.
Le « burn out » ? C’est tout droit !
Causes : démultiplication des contradictions dans l’entreprise
Dans les organisations, les modèles classiques de management évoluent lentement tandis que les aspirations individuelles se diversifient de manière rapide. D’où une population qui dit s’ennuyer au travail, mais qui se retrouve aussi coincée par la conjonction d’un chômage de masse qui fait peur.
La double perspective de devoir travailler jusqu’à 70 ans, sans avoir de garantie stable sur le niveau de ses montants de retraites provoque une vraie difficulté à se projeter sur le long terme. Le présent, et son instantanéité, deviennent alors la norme temporelle de référence et bloquent tout effort de projection, individuelle et collective.
La valeur « travail » perd son effet de levier en tant qu’instrument social de reconnaissance et de structuration. Les valeurs véhiculées par le discours « corporate » officiel apparaissent en décalage par rapport…
- Aux slogans du type « faites mieux avec moins ». Comme s’il existait une optimisation infinie… jusqu’à la disparition de soi.
- Aux choix prudentiels des salariés (on fait le dos rond) et, en même temps, à leurs tentations de se risquer au tout pour le tout (l’effet contagieux de la « start up »).
Conséquences : l’instabilité comme état de fait
- L’épuisement au travail : la baisse du taux de rendement de la force physique, par rapport aux technologies d’automatisation et de robotisation déshumanise le sens du mot « travail ». L’injonction d’une employabilité constante et immédiate pousse toutes les catégories de travailleurs à un « marketing de soi » constant et usant.
- L’épuisement énergétique : sur une planète surchauffée, l’asymptote atteinte par les réserves identifiées de matières fossiles accélère la logique de déclin et d’angoisse,… tandis que les nouvelles sources d’énergie restent encore loin de leur seuil de rentabilité.
- L’épuisement compétitif : les logiques de concurrence, base du système économique libéral depuis deux siècles, montrent leurs limites. La baisse constante des marges, dans un monde globalisé, contraint les entreprises étranglées à l’innovation permanente. Mais l’innovation ca ne se décrète pas,… et ca ne réussit pas à tous les coups.
- L’épuisement de la connectivité : la communication 24 heures sur 24 rend toute organisation poreuse, alors même que les temps de transport vont en s’accentuant. C’est la fin des limites, des zones protégées ou tampons entre vie personnelle et vie professionnelle. Dès lors, la prise de recul, la respiration, la mise en perspective constituent autant de moments rares, luxueux, hors de prix. Inatteignables.
Juste pas de temps pour « prendre le temps ». Une redéfinition du temps s’avère impérative. La séparation temps perso / temps pro a perdu toute réalité. D’autres formes de temporalité vont voir le jour ; elles dépendront davantage ce que l’on fait, et avec qui, que du lieu où on le fait. Temps pour la réflexion, temps pour l’action, temps pour l’expérience, etc. Temps collectif, temps individuel… les nouveaux champs du temps nous ouvrent leurs bras.
Nicolas Rousseaux
Photo © Nicolas Rousseaux – Tous droits réservés
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