Chroniques

L’âme de la France

Posted: 9 avril 2017 à 3:27   /   by   /   comments (0)

Et si… face aux sceaux Made in Germany, Made in Japan, ou Swiss made, le tampon Made in France  valait de l’or ! Nation, donnée singulière. La philosophie historique d’un peuple reste inséparable du dessein qu’il se donne. De quoi est donc composée la France et comment la différencier ?

 

La marque « France » : un réenchantement possible

Peu de pays s’incarnent dans une volonté, une conception délibérée et assumée de  soi. Comme les Etats-Unis, Israël, la Russie, l’Inde, le Japon, la France partage cette prétention irrationnelle, sentiment d’une mission quasi divine, menant jusqu’au sacrifice de soi. Gandhi et Mishima partagent la destinée de la pucelle d’Orléans.

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Autre particularité française, la perfection du style. Seule la Grèce antique a affiché un aplomb similaire, en l’occurrence vraiment universel. En 1899, la Chine traduit son premier roman occidental. Ce sera La Dame aux Camélias. Le style importe car il figure l’architecture de l’esprit. Les Français maîtrisent cet agencement génial, si rare.

Depuis des siècles, la France a su incarner une politique historique. Des hommes se soumettaient à des orientations délibérées, et l’action de ceux-ci changeaient le destin du monde. Lorsque Richelieu arrive au pouvoir, la France est un pays de deuxième ordre. Quand il meurt, elle est la première nation de l’Occident. Entre les deux, l’exercice d’une volonté.

Puis, au XIX° siècle, surgissent l’empire britannique, l’hégémonie allemande, l’Amérique, Le Capital, Nietzsche, Darwin. En 1914, un monde se clôt. De victoires ruineuses (Verdun) en humiliations interminables (1940, « le plus atroce effondrement de notre histoire » Marc Bloch ; Diên Biên Phu, abandon piteux de l’empire), une lecture fataliste, à rebours de notre passé voit le jour, avec son flot de pénitences et d’autoflagellations. Les élites françaises refusent de célébrer Austerlitz, tandis qu’outre-Manche on ne se prive pas de fêter Trafalgar.

Les ressorts de notre fierté semblent ainsi se dissoudre. Dans un Occident qui, toujours, eu l’idée d’un type d’homme exemplaire (Rome est entré ainsi dans l’histoire), la France s’est bâtie autour de valeurs puissantes et complémentaires : la science et l’humain. Mais en détruisant son aura (la bombe H), la science s’est détachée de l’homme. Cette fracture a engendré un repli sur les terres bénies de notre doulce France. « Les Français ont sacrifié le monde à la France. Que feraient-ils à l’étranger ? » (Cioran en 1941).

Onze entreprises tricolores ont beau avoir intégré le Top 100 mondial… Mais voilà, musées, sacs à main, parfums, dives bouteilles symbolisent les cocardes d’une marque réduite au luxe et au patrimoine.

Pourtant, entre le couronnement chrétien de Clovis et le culte républicain de 1789, la trame n’a pas changé. Fruit de deux millénaires, la France a su tisser les fils qui ont enrichit la solide beauté de son étoffe, ni patchwork, ni juxtaposition artificielle de couches culturelles. Faite de grandeur, d’éternel (« que jamais de France, ne sorte la Gloire qui s’y est arrêtée » chante Roland, au XI° siècle) pourquoi la France serait-elle incapable de combler les lacunes de sa mémoire, tout en évitant les écueils passés du donneur de leçon arrogant.

Des cathédrales (le transept de Beauvais) à Napoléon (« du haut de ces pyramides, 40 siècles vous contemplent ») combien de défis invraisemblables, audaces, ont fait vibrer tout un peuple. « Impossible » n’est-il pas français ?

Dans le réensemencement de son avenir par le passé, peut surgir une marque France revigorée. « Plus grande est la portion du passé qui tient dans le présent, plus lourde est la masse qu’il pousse dans l’avenir pour presser contre les événements qui se préparent : son action, semblable à une flèche, se décoche avec d’autant plus de force en avant que sa représentation étaient plus tendue vers l’arrière. » Signé Henri Bergson.

Telles sont les missions de chaque entreprise rassemblée : restructurer le fil de ses souvenirs, reconquérir une innocence de l’âme, combler notre méconnaissance de la culture de « l’autre » et des conditions de confiance réciproque, bouger, faire pression, clamer nos avantages concurrentiels, sous-estimés (Fintech, nanos, médecine, aérospatial, cosmétologie, nouveaux matériaux,…) avant que notre raison d’être français se mure, tel un coquillage séculaire à bout de souffle.

La marque « France » est un combat. Elle a besoin d’esprits offensifs, pas d’un « catenaccio » protectionniste.

Nicolas Rousseaux,

 Fondateur de Mediation-consulting,

Stratégies de la transformation

©    Nicolas Rousseaux, 2017

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