Chroniques

Grande école = alcool

Posted: 6 septembre 2015 à 11:03   /   by   /   comments (2)

NXR_Logo_RVB-01Le filtre : le système hyper sélectif des futures élites commerciales et de gestion françaises, autrefois célébré, se retourne aujourd’hui contre lui. Les campus des grandes écoles se transforment en camps d’hébergement de gueules de bois, soumis à un régime laxiste de 14 heures de cours par semaine. Une génération non seulement « décalquée »,… mais déconnectée des enjeux vitaux de l’économie mondiale et enfermée dans ses illusions. La conséquence : un nouveau dialogue, plus approfondi, entre jeune diplômé et employeur potentiel sur l’usage du temps passé pendant les études, l’acquisition de réelles compétences, la qualité de l’enseignement.


13.500 € la « biture »

Les écoles de commerce françaises au fond du tonneau

Voilà un BDE (Bureau des Elèves) fier de lui. Auto proclamé plus grand BDE de France, le BDE de l’Essec (avec ses 40 étudiants mobilisés) parade. Son programme ? Par ordre d’entrée en scène :

  1. Les journées happenings : petits déjeuners, journées à thème et autres « surprises »
  2. Les soirées : des teufettes, mythiques soirées. Plus, les « soirées fermées » (?)
  3. Les bouffes : chanter sa fierté d’être ESSEC autour d’un dîner et d’une soirée en toute convivialité.
  4. La Nuit de l’ESSEC : la plus grosse soirée électro de France

Témoignages d’anciens recueillis par France Télévision :

« Après deux ans de prépa intensive, les étudiants qui arrivent à l’école relâchent la pression, analyse Arthur, 24 ans, ancien élève d’une prestigieuse école. On s’est battus pour entrer dans ces écoles, le plus dur est derrière nous. On peut profiter. »

« On teste nos limites entre étudiants. L’école, c’est aussi apprendre à se sociabiliser, à s’adapter, à réfléchir rapidement même si on a bu toute la nuit et dormi deux heures », temporise Thomas, 28 ans, ancien étudiant de l’EM Lyon, qui voit dans les beuveries des rites de passage formateurs. A l’inverse, d’autres estiment que les écoles vont trop loin et que les administrations ferment les yeux. « C’est aussi une pression de groupe, on est constamment poussé à boire. Il y a même un local au sein de l’école pour stocker l’alcool et faire la fête« , rapporte Arthur.

Aucun bureau des élèves (BDE) n’a souhaité répondre aux questions de France Télévision. Un ancien membre du BDE d’une école de commerce parisienne explique :« Ces écoles fonctionnent sur le réseau, on ne peut pas témoigner ou critiquer à visage découvert sans se retrouver grillé professionnellement. »

Complicité « hors la loi » des grandes marques d’alcool

Dix euros l’entrée en club avec cinq tickets consos. Puis des tickets vendus 50 centimes à l’intérieur. Plutôt attractif. Ces tarifs très bas, pratiqués dans les soirées où l’alcool coule à flots, sont financés directement par les fabricants d’alcool. Pourtant, le sponsoring est formellement interdit par la loi Evin.

« Les marques cassent les prix sur les bouteilles ou avancent le stock d’alcool en mettant gratuitement des bouteilles à la disposition du BDE, qui remboursera en fonction de ce qui a été consommé lors de la soirée », révèle un ancien président de BDEEn échange, les marques peuvent librement faire leur publicité, distribuer bons de réductions et échantillons gratuits toute la nuit.

Ces approvisionnements en alcool, facilités par les fabricants, permettent de proposer des prix très bas et de se rapprocher du système des open bars, interdit par la loi Bachelot. Un ancien président du BDE confirme : « Les open bars étant interdits, nous proposions un système de tickets. On en distribuait une cinquantaine par personne. »

14 heures de cours par semaine

Le pire vient des étudiants ayant passé par les deux ou trois années de classes préparatoires, et leur régime draconien. Une fois les concours terminés, le débarquement sur le campus vaut « libération ». A 21 ans, vendredi matin, c’est week end ! Retour lundi dans l’après-midi… Mieux que les 35 heures !

Les conséquences dans les premiers stages en entreprise peuvent, du coup, s’avérer dramatiques : mode de pensée totalement en pointillé, incapable de se motiver, de se concentrer, de s’investir, dans un état de léthargie permanent. On arrive au bureau à 10  heures du matin, on a rendez-vous chez le dentiste à 17h….

Une rumeur court sur les campus, sur le ton de la blague : « Oui, c’est HEC les meilleurs, vraiment… En taux d’alcoolémie ».

Pourquoi les Shanghaiens n’intégreraient-ils pas un nouveau critère de mesure de la qualité des diplômés dans le monde pour leur célèbre classement ? De quoi diligenter une descente de pompiers sur le campus de Jouy-en-Josas, histoire d’effectuer quelques prises de sang…

Les plus choqués par cette situation sont les étudiants étrangers qui voyaient dans leur intégration au sein de ces grandes écoles françaises une forme d’élévation intellectuelle au contact d’une génération de futurs leaders. Ils tombent de haut. L’un d’eux témoigne : « moi, je préfère mes cours à l’université. Au moins, on y bosse. J’y ai deux fois plus d’heures de cours que sur le campus. »

Droits de scolarité à HEC : 40.500 €

Pour les étudiants issus du concours d’admission sur classes préparatoires, entrant à HEC en 2015, le coût total des droits de scolarité (hors année de césure) était fixé à 40.500 €. Pour les étudiants issus de l’admission directe en cycle master, entrant à HEC en 2016, le coût total des droits de scolarité (hors année de césure) est fixé à 29.800 € pour les étudiants ressortissants de pays de l’Union Européenne.

A l’EM Lyon : 13 500 €/an. Ce tarif comprend les frais de scolarité, les droits d’inscription ainsi que l’adhésion à vie au réseau « EMLYON Forever » pour l’année académique 2015/2016 et peut être sujet à modification sans préavis. Droits d’inscription incluant notamment les frais administratifs, la cotisation à la corporation des étudiants, les activités sportives à l’école, l’assurance mobilité internationale.

A l’Essec,  les frais de scolarité, hors cotisations au BDE, s’élevaient pour l’année 2014-2015 à 10.600 € par an. Aucun frais supplémentaire n’était à prévoir pour les échanges académiques à l’étranger. Toutefois, les frais liés aux voyages (vie sur place, logement, assurances) sont à la charge de l’étudiant.

Le droit « d’accéder à la dynamique collective » (expression employée dans une brochure de BDE) n’est pas donné. Compte tenu de l’affaiblissement continu du niveau académique des étudiants dans tous les domaines :

  • approfondissement de la pensée
  • culture générale
  • prise de note intelligente
  • structuration et diversification de la recherche intellectuelle
  • modes d’analyse…

…la « douloureuse » n’en est que plus amère. La bouteille garde sa belle étiquette, mais le contenu a désormais le goût du vinaigre.

Nicolas Rousseaux

 

Source complémentaire : http://www.francetvinfo.fr/france/les-grandes-ecoles-sont-elles-des-lieux-de-debauche_567067.html

photos : © Nicolas Rousseaux

Comments (2)

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  • 7 septembre 2015 à 2:49 Etudiant alcoolique

    L’auteur de cet article était-il aussi imbibé que les étudiants qu’il vilipende ? Sans doute pour empiler ainsi les clichés réchauffés dans un enchevêtrement de vacuité… Vous ne méritez pas que l’on prenne la peine de pointer toutes vos inexactitudes, approximations et stupidités. Epargnez au monde votre « analyse », vous n’apportez rien au débat. Vous tentez de cacher piètrement votre peur de cette génération à laquelle vous ne comprenez rien. Vous êtes à l’image des billets de ce blog, enfermé dans une nostalgie retrograde. Vous êtes obsolète et il est temps de vous recycler. Surveillez vos emplois, les ivrognes arrivent…

  • 9 septembre 2015 à 12:29 Nicolas Rousseaux

    Cher monsieur
    Merci pour votre commentaire. Mais je regrette qu’il ne soit justement qu’un commentaire. Puisque cliché il y aurait, apportez nous donc les faits que nous permettrait de reconnaître notre exagération. Le mépris vous est facile, la contradiction moins aisée.
    Cela fait 40 ans que j’embauche des stagiaires et des jeunes diplômés. Permettez moi d’user de ce recul pour vous dire que toutes les qualités espérées que nous citons et que nous attendons des futures élites sont de plus en plus rarement au rendez vous.