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La chute fortuite du mur de Berlin (2)

Posted: 23 août 2015 à 11:27   /   by   /   comments (0)

Oui, le massacre de Tien An Men était reproductible à Berlin

Face à la révolte étudiante de Beijing du printemps 1989, Deng Xiao Ping a tué dans l’œuf le mouvement avant qu’il ne se propage dans tout le pays. Une fois le feu vert donné à la répression, en juin, il condamna les « durs » du PCC, ceux-là même qui lui avaient obéi, pour installer Jiang Zemin à la tête du pouvoir.

Le Shanghaien put ainsi épurer le Parti, et lâcher du lest en accélérant la libéralisation économique. Tout le contraire d’Erich Honecker, en RDA, qui laisse la révolte gronder durant tout l’été, depuis les églises de Leipzig. Devant la précipitation des événements, la stricte séparation entre Stasi (en charge des postes frontières) et l’armée (à la botte des 350.000 soldats soviétiques présents sur le sol allemand), n’a pas permis aux nombreux partisans de la répression massive de s’organiser.

Le 9 novembre au soir, l’état-major de l’armée qui devait se réunir à 17h, n’a commencé l’examen de la situation qu’à 22h, sans avoir regardé les télévisons occidentales ni avoir eu accès aux premiers rapports inquiétants des postes frontières (disposant de 54.000 fusils et 3.000 tonnes de munitions).

Un jeune officier du KGB en poste ce soir là à Dresde se souviendra toute sa vie de ce funeste abandon par l’Union soviétique de sa position stratégique en RDA. Son nom : Vladimir Poutine. Au même instant, agrippée aux grillage du poste de Bornholmer Strasse, une jeune étudiante : Angela Merkel.

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Concours de circonstances, accélérations et points de non retour

Que retenir de ce formidable pied de nez populaire aux forces du Mal ?000077

Heure par heure, un enchaînement invraisemblable d’indécisions, de malentendus, de retards. L’après-midi du 9, un comité central du parti a lieu à la va-vite. Le porte parole n’est pas là car il doit donner une conférence de presse. On lui passe alors des papiers à lire, dont un brouillon manuscrit qu’il découvre devant les caméras. Dans un tohu-bohu total, il annonce « l’ouverture des frontières ». Sans préciser de date, de conditions ou de processus. Les journalistes lui demandent d’être plus précis. Il fait mine de ne rien savoir et s’en va. Les journalistes présents dans le salle se regardent, interloqués. La mèche est allumée.

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Harald Jäger, garde frontière, lieutenant colonel de la Stasi.

De permanence le 9 novembre 1989 au poste de Bornholmer Strasse.

Le 9 novembre à 19h, une vingtaine de personnes lui demandent de passer la frontière. A 20h30, ils sont plusieurs centaines. Il donne plus de 30 coups de téléphone, mais est incapable de joindre un officier, sauf un qui le traite de « lâche ». A 23h30, n’osant pas ouvrir le feu sur la foule immense, il lève les barrières.

Licencié sur le champ après 29 ans de services, il devient chauffeur de taxi, gardien. Il vit aujourd’hui retiré en dehors de Berlin et passe son temps à jardiner.

Nicolas Rousseaux

 

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The Collapse

The accidental opening of the Berlin wall

by Mary Elise Sarotte

Basic Books – Perseus Books, 2014

 

 

photos : © Nicolas Rousseaux, 1989

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